L’abjuration collective de Mérindol

L’abjuration des habitants de Mérindol est enregistrée par le notaire Bosse, de Lauris, le 30 octobre 1685, alors qu’ils ont déjà abjuré, en date du 20 octobre, la veille de l’arrivée des dragons dans le village. L’acte notarié est rédigé à la demande expresse du comte de Grignan gouverneur de Provence. Celui-ci devait en effet rendre un compte précis des abjurations effectuées dans son ressort. Le délai entre l’abjuration et l’acte notarié est exceptionnellement long par rapport aux autres communautés voisines.

À la longue liste des habitants de Mérindol s’ajoute celle, plus modeste (47 abjurants) de ceux du Puget, petit village à 5 km à l’est de Mérindol.

Le 20 octobre, avant la venue des soldats, 789 protestants se rendent à l’église paroissiale pour abjurer leur foi. 47 viennent du Puget et 8 de divers autres villages provençaux. Le curé André Félix les reçoit. Les 179 groupes familiaux représentent à elles seules 714 personnes. L’acte notarié de Mérindol, contrairement aux autres, fournit plus d’indications sur les métiers ou statuts sociaux. Sur les 66 mentions, nous retiendrons que la moitié appartient au monde des paysans, le reste évoquant le monde des métiers, des tisseurs essentiellement.

Les signatures sont celles de 39 individus soit 9% de l’ensemble. Quant à la forme de l’acte, elle est atypique par rapport aux autres actes d’octobre 1685. En effet, l’acte comprend un protocole initial avec une invocation à Dieu et une allusion au règne de Louis XIV. Le notaire aura voulu faire preuve d’un zèle particulier en soignant l’entrée en matière, sans doute pour solenniser l’événement et peut-être aussi parce que celui-ci est rédigé à la demande du gouverneur. Il est à remarquer aussi l’engagement à transmettre la foi catholique aux enfants nés ou à naître.

L’état de 1682 [1] dénombrant les protestants de Provence annonce 900 pour Mérindol. On peut imaginer que ce nombre inclut les habitants du Puget, vu que ce village n’est pas mentionné spécifiquement dans ce recensement. En tenant compte des fluctuations entre 1682 et 1685, ainsi que des éventuelles approximations de l’état, on note un écart de 111 individus.


[1] BN : Fonds français – Nouvelles acquisitions – cote n. a. fr 22 151
« Estat contenant le dénombrement des persones et familles faisan profession de la RPR en Provence »